La diffusion par BFMTV et CNEWS de vidéos Tiktok de jeunes lycéen.ne.s en tenues décrites comme religieuses a récemment renforcé la thèse sensationnaliste d’une « offensive islamiste à l’école ».
Les auteurs de ces vidéos ont ainsi été accusé.e.s dans la presse écrite et lors de débats télévisés d’encourager le port de tenues religieuses dans les lycées, d’appeler à la provocation, voire de faire pression sur le personnel pédagogique. Face à cet emballement, le CCIE tient à apporter sa connaissance des faits afin de mettre ces vidéos en perspective.
Les vidéos, extraites de leurs contextes, diffusées à la télévision sans l’autorisation des personnes concernées et insuffisamment anonymisées, ont de fait exposé ces personnes mineures à un risque évident de harcèlement, de façon absolument irresponsable. Certaines des personnes concernées ou leurs familles se sont tournées vers le CCIE pour faire part de leur désarroi quant à cette exposition médiatique. Une vidéo Tiktok diffusée par CNEWS pour illustrer “les atteintes à la laïcité dans l’enseignement” montre ainsi un jeune lycéen en qamis au lycée avec ses amis, sans indiquer que cette tenue était portée à l’occasion d’une journée déguisée organisée un an plus tôt, et qu’elle n’a alors provoqué aucun problème pour le personnel éducatif. Le jeune homme étant facilement reconnaissable malgré le floutage de son visage, sa famille redoute les conséquences que la diffusion de ces images aura pour son avenir.
De la même façon, une lycéenne ayant tourné une vidéo sur un ton humoristique en se montrant en capuche avec la légende “méthode pour camoufler ses cheveux au lycée” a reçu la nouvelle par ses amies que sa vidéo avait été diffusée par CNEWS pour dénoncer le prosélytisme au lycée. La lycéenne n’avait pourtant mis cette capuche que l’espace d’une seconde pour réaliser le Tiktok, tout en précisant dans les commentaires que cela n’était pas permis au lycée. Si son visage est alors flouté, il est là encore aisé de l’identifier puisqu’il suffit de taper dans la barre de recherche la légende qui accompagne la vidéo pour retrouver son compte. Elle est depuis la cible d’un harcèlement caractérisé sur les réseaux sociaux et au sein de son lycée. Sa mère craint un déferlement de haine à son encontre et déplore que “l’on ait fait passé sa fille de 17 ans pour une intégriste”.
Ce traitement médiatique criminalise de simples jeux d’adolescents, qui expérimentent, exagèrent, s’amusent, etc. – comme il est tout à fait ordinaire à leur âge. Il ne s’agit de surcroît que de quelques vidéos isolées et spécifiquement sélectionnées, et non d’un phénomène massif comme cela est suggéré.
Cibler ces adolescents au lieu de les défendre face aux injustices dont ils sont victimes, c’est les rendre responsables de polémiques qui les dépassent largement, créées dans un climat de surenchère médiatique et politique quant aux dangers de “l’islamisme”. C’est aussi occulter le véritable problème.
La vraie dérive est celle qui se fait voir à travers les récits de nombreux élèves recueillis par le CCIE lors de cette rentrée scolaire : lorsque des surveillants, des professeurs ou des proviseurs harcèlent, humilient et insultent les élèves du fait de leurs tenues vestimentaires, lorsqu’ils leur font vivre de véritables interrogatoires au sujet de leurs croyances religieuses, lorsqu’ils les obligent à choisir entre se dévêtir ou manquer des heures de cours, ce sont les valeurs de l’école et les droits des élèves qui sont bafoués. Le CCIE réaffirme son soutien à toutes celles et tous ceux qui sont victimes de telles discriminations.