Auteur/autrice : La Rédaction

Absences les jours de fêtes religieuses

Télécharger la fiche pratique Pouvez-vous vous absenter pendant le jour de l’Aïd en tant que fonctionnaire, salarié dans le privé ou élève inscrit dans le public ? Quels sont vos droits ? Que dit la loi ? 1/ Vous êtes fonctionnaire : Si vous êtes fonctionnaire ou assimilé, la Circulaire n°MFPF1202144C du 10 février 2012 relative aux autorisations d’absence pouvant être accordées à l’occasion des principales fêtes religieuses des différentes confessions rappelle que « les chefs de service peuvent accorder aux agents qui désirent participer aux cérémonies célébrées à l’occasion des principales fête propres à leur confession, les autorisations d’absence nécessaires ». Le Conseil d’État a fait valoir que « l’institution par la loi de fêtes légales ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que, sous réserve des nécessités du fonctionnement normal du service, des autorisations d’absence soient accordées à des agents publics pour participer à d’autres fêtes religieuses correspondant à leur confession » (Conseil d’Etat, 12 février 1997, Melle Henny, n°125893). La demande d’autorisation d’absence pour une fête religieuse doit être présentée par l’agent concerné, via son supérieur hiérarchique, au service du personnel. Ainsi, les chefs de service peuvent accorder à leurs agents une autorisation pour participer à une fête religieuse dans la mesure où cette absence est compatible avec le fonctionnement normal du service sans porter atteinte au principe de laïcité. L’annexe de la circulaire n° MFPF1202144C du 10 février 2012 du ministère de la Fonction publique précise : « les dates de ces fêtes étant fixées à un jour près, les autorisations d’absence pourront être accordées, sur demande de l’agent, avec un décalage en plus ou en moins. Ces fêtes commencent la veille au soir ».   Quel est le régime applicable à cette journée non travaillée ?                                                  Il convient de distinguer l’autorisation d’absence (fonction publique) et la prise de jours de congé.        L’autorisation d’absence permet au demandeur de bénéficier de jours d’absence non décomptés de son quota annuel. Il s’agit de jours de congés supplémentaires (comme lorsque l’on se marie, par exemple). La prise de jours de congés est décomptée de son quota de congés ou RTT Si l’absence à son poste de travail devrait conduire l’agent à se voir appliquer une retenue sur salaire en application de la notion du service fait, les absences pour motifs religieux, en ce qu’elles sont prévues par la loi, échappent à cette règle, autorisant alors le fonctionnaire à s’absenter de son service sans pour autant subir une perte de rémunération. Les professeurs fonctionnaires publics se voient appliquer le régime ci-dessous : Ils peuvent s’absenter de leur service Ne subissent pas de perte de rémunération L’absence n’est pas décomptée de leurs jours de congés Ils ne sont pas tenus de rattraper les cours qu’ils n’auront pas dispensés car les autorisations d’absence rémunérées sont assimilées par la loi à du temps de travail effectif. Sous réserve, qu’ils aient bien demandé cette autorisation d’absence rémunérée pour motif religieux à leur supérieur hiérarchique et qu’il leur ait accordée 2/ Vous êtes salarié : Si vous êtes salarié dans une entreprise, c’est le droit privé qui s’applique. Le droit du travail garantit la liberté de religion aux salariés tout en permettant à l’employeur d’y apporter certaines restrictions. Mais, attention, aucun employeur ne peut instaurer des limitations absolues et générales à la liberté de religion. L’articleL.1121-1 du Code du travail, en proclamant qu’il est interdit d’« apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ». Ainsi, un salarié est en droit de solliciter un jour de congé pour fête religieuse à condition que cette absence n’entrave pas l’organisation de l’entreprise. Il appartiendra à l’entreprise de démontrer que la présence du salarié est nécessaire pour justifier son refus. 3/ Vous êtes un élève : Concernant les élèves des écoles, collèges et lycées publics, la Circulaire N°2004-084 Du 18- 5-2004 JO du 22-5-2004 précise que : « Des autorisations d’absence doivent pouvoir être accordées aux élèves pour les grandes fêtes religieuses qui ne coïncident pas avec un jour de congé et dont les dates sont rappelées chaque année par une instruction publiée au B.O ». Ainsi, les élèves peuvent bénéficier individuellement d’autorisations d’absence nécessaires à la célébration d’une fête religieuse dans le cas où ces absences sont compatibles avec l’accomplissement des tâches inhérentes à leurs études et avec le respect de l’ordre public dans l’établissement (CE, 14 avril 1995, n° 157653). Dès lors, il est recommandé d’informer l’établissement de l’absence de l’élève par un mot dans le carnet de correspondance. Que faire si on refuse que vous vous absentiez le jour de l’aïd : Si votre supérieur refuse que vous vous absentiez le jour de l’aïd, il faut lui demander Vous pouvez ensuite lui rappeler le cadre légal qui vous permet une telle demande. Enfin, si vous estimez que ce refus n’est absolument pas justifié, n’hésitez pas à contacter le CCIE qui vous apportera l’aide juridique nécessaire. Télécharger la fiche pratique Ajoutez votre titre ici

Sonder la laïcité aujourd’hui

Le 8 décembre, l’IFOP a fait paraître les résultats d’une enquête réalisée auprès des musulmans quant à la laïcité et la place des religions à l’école et dans la société. La nature même de l’enquête étonne : puisqu’il n’existe que des citoyens et que la France ne reconnaît pas les communautés, pourquoi singulariser les musulmans pour cette enquête ? Cette démarche nourrit l’idée de l’étrangeté des musulmans, considérés comme posant problème a priori. Les revendications quant à la présence de crèches de Noël dans les espaces officiels ou quant à la célébration de Hanoucca à l’Élysée même, ne suffisent pas à pousser à envisager les atteintes à la laïcité ailleurs qu’au sein des communautés musulmanes – alors que ces dernières ne demandent qu’une application juste et égalitaire du principe de laïcité. D’après l’enquête, réalisée par sondage, l’écart se creuse entre les plus jeunes générations et le principe de laïcité. Comme souvent lorsque ce principe parait au débat public, les commentateurs et éditorialistes de tout bord y ont vu la preuve du complot musulman (frériste, islamiste, séparatiste, selon les terminologies changeantes auxquelles nous a habitués le débat public français), voire du grand remplacement lui-même, coupable de subvertir depuis l’intérieur les valeurs les plus consacrées de la société française. Il semble en effet que le sondage soit accablant : près de 78% des Français musulmans « jugent l’application de la laïcité discriminatoire ». Ce constat ne leur est pas réservé : 60% des 18-30 ans, toutes confessions (ou absence de) confondues, considèrent que « la défense de la laïcité est instrumentalisée par des personnalités politiques et des journalistes qui veulent en fait dénigrer les musulmans ». Les biais méthodologiques que comporte tout sondage sont connus, qu’il s’agisse de l’imposition de problématiques ou de leur formulation même, lesquelles n’ont de cesse de valider les politiques publiques en vertu desquelles le sondage a été le plus souvent commandé. Il n’en demeure pas moins que ces marqueurs, même s’ils doivent être relativisés, sont éloquents. Encore une fois, ces jeunes musulmans ont-ils réellement un problème avec le principe de la laïcité comme beaucoup le prétendent, ou bien formulent-ils une opinion tout à fait sensée, légitime et adaptée à la réalité de l’application de la laïcité en France aujourd’hui ? Autrement dit, ces sondés ne considèrent-ils tout simplement pas, comme la sociologue Véronique Altglass, que « laïcité is, what laïcité does », c’est-à-dire que la laïcité est ce qu’elle fait : elle n’est pas une force motrice qui prédéterminerait magiquement une réponse unilatérale aux cultes, mais bien un enjeu de lutte aujourd’hui utilisé dans une perspective parfois explicitement islamophobe. Cette analyse quant à la réalité profondément discriminatoire de la laïcité telle qu’elle est mise en pratique aujourd’hui est en effet soutenue par une abondante littérature en sociologie. Cette désaffection générationnelle et communautaire à l’égard du principe de laïcité est ainsi la résultante directe de son instrumentalisation et de son travestissement, dont tous les observateurs avertis avaient prévenu du danger en amont. En faisant de la laïcité un outil de lutte contre une minorité stigmatisée ( « la laïcité offensive ») le nationalisme français a ainsi travesti l’œuvre morale et politique accomplie par la loi de 1905. Les dégâts que nous observons aujourd’hui leur sont entièrement imputables, et il nous reste à contempler le cynisme de ceux qui prétendent sauver la République et ses lois en les détournant de leur œuvre de bien commun. Loin de délaisser la (véritable) laïcité ou de s’y opposer, les musulmans de France et d’Europe cherchent à la faire respecter et à faire respecter leurs droits constitutionnels. Le Collectif contre l’islamophobie en Europe peut fièrement dire qu’il se compte parmi les derniers tenants de l’esprit de la loi de 1905. Cela l’autorise ainsi à appeler ceux et celles qui voient encore la laïcité comme une liberté, autant que l’égalité de toutes et tous face à l’État, à s’opposer à la politique anti-musulmane dont la France a fait sa marque de fabrique.

Foulard et refus de soins

Télécharger la fiche pratique Sirine se rend chez un médecin après avoir obtenu un rendez-vous chez ce dernier. Une fois au cabinet, la secrétaire lui demande de s’installer mais lorsque vient son tour, le médecin refuse de l’examiner si elle ne retire pas son foulard en précisant que son cabinet est laïque. Sirine ressort du cabinet tout en se demandant comment elle aurait pu réagir. Que dit la loi ? La liberté religieuse des patients La liberté religieuse des patients est un droit fondamental qui est garanti par de nombreux textes nationaux et internationaux notamment par l’article 1er de la Constitution du 4 Octobre 1948, les articles 9 et 14 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme, l’article 18 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques, l’article 7 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ou encore l’article 13 du Traité instituant la Communauté Européenne. Toute restriction à une liberté fondamentale doit être justifiée par la nature du soin et être proportionnée au but recherché. L’article L1110-3 du Code de la santé publique précise qu’aucune personne ne peut faire l’objet de discriminations dans l’accès à la prévention ou aux soins. Par conséquent, toute restriction doit être justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnées au but recherché et les interdictions générales et absolues sont prohibées. Si ce n’est pas le cas, nous sommes dès lors en présence d’un traitement différencié à l’égard des femmes portant le foulard. Or, le Code Pénal prévoit et réprime sévèrement le délit de discrimination religieuse en ses articles 225-1 alinéa 1er et 225-2, lesquels disposent respectivement que :« Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison (…) de leur appartenance, vraie ou supposée, (…) ou une religion déterminée »« La discrimination définie aux articles 225-1 (…) commise à l’égard d’une personne physique ou morale est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 Euros d’amende lorsqu’elle consiste :1° A refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ; (…)4° A subordonner la fourniture d’un bien ou d’un service à condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1 (…).Lorsque le refus discriminatoire prévu au 1° est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d’en interdire l’accès, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 Euros d’amende ». Le Code de déontologie des médecins Les différents codes de déontologie des professions de santé (médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, infirmiers, masseurs kinésithérapeutes pharmaciens, etc.) prévoient également un principe de non-discrimination et rappellent que le patient doit être traité avec dignité. Le respect de la personne humaine implique que l’on se comporte avec les patients avec correction et aménité, et que ceux-ci soient traités avec dignité et sans distinction. Dès lors le praticien ne peut discriminer des patients parce qu’ils appartiendraient à une ethnie ou une religion déterminée, le praticien devant se garder de tout comportement irrespectueux. Les professionnels contrevenant à ces obligations légales et déontologiques sont passibles de sanctions disciplinaires, pécuniaires et/ou pénales.Le Code de déontologie des Médecins rappelle par exemple en son article R.4127-2 que : « Le médecin, au service de l’individu et de la santé publique, exerce sa mission dans le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité». Par ailleurs, l’article R.4127-7 du même code prévoit également un principe de non-discrimination : « Le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient leur origine, leurs mœurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur réputation ou les sentiments qu’il peut éprouver à leur égard. Il doit leur apporter son concours en toutes circonstances. Il ne doit jamais se départir d’une attitude correcte et attentive envers la personne examinée. »Par conséquent, le médecin ne peut pas invoquer le principe de laïcité pour refuser de soigner Sirine. En effet, la déontologie impose au médecin de donner ses soins à toute personne les demandant et en toute situation. Si des situations particulières permettent à un médecin de refuser ses soins qui sont strictement encadrées par l’article R.4127-47 du Code de la santé publique, elles ne peuvent être fondées sur un motif discriminatoire. Dès lors : Toute attitude discriminatoire avérée est passible de poursuite disciplinaire. Toute attitude discriminatoire nuit à l’accès aux soins, et peut aboutir à un renoncement aux soins préjudiciable au patient et est constitutive d’un refus de soins. En outre, dans le cas de Sirine, ledit médecin n’a pas pris les dispositions nécessaires pour que soit assurée la continuité de la prise en charge. Que dois-je faire ?  Si vous faites l’objet d’une telle discrimination chez un médecin, voici quelques conseils : Enregistrez les propos en question si possible (sans les diffuser) Demandez quel est le motif qui justifie que l’on vous refuse l’accès aux soins Saisissez le Défenseur des droits Signalez la discrimination à l’Ordre des médecins compétent Saisissez le directeur de l’organisme local d’assurance maladie Déposez plainte ou une main courante au commissariat ou à la gendarmerie de votre choix Contactez le CCIE qui pourra vous apporter aide et assistanc Télécharger la fiche pratique

Marcher contre l’antisémitisme ou avec l’extrême-droite islamophobe ?

À l’heure de l’appropriation de la lutte contre l’antisémitisme par l’extrême droite à des fins explicitement islamophobes, le collectif Lignes de Crêtes et le Collectif contre l’Islamophobie en Europe (CCIE) expriment leur colère et leur inquiétude. Nous refusons collectivement que la marche dite contre l’antisémitisme prévue le 10 décembre à Bruxelles avec l’appui de l’extrême-droite islamophobe ne soit l’occasion d’une énième prise d’otage de la lutte contre l’antisémitisme par les forces les plus réactionnaires et les plus nationalistes de la société […]. Lire l’intégralité du communiqué

La ratonnade, retour d’une pratique fasciste

L’histoire récente de la relation de la société française à ses musulmans paraît surdéterminée d’un côté par la survenue meurtrière et répétée de la violence terroriste et de l’autre par les formes de répression de plus en plus englobantes que met en œuvre l’État français. Celui-ci, pour paraphraser le philosophe Alain Badiou, semble agir comme le boxeur ayant subi un choc de rare brutalité et répondant par une succession de coups aussi désordonnés que contre-productifs. À la suite de la guerre d’indépendance algérienne, la communauté issue de l’immigration postcoloniale et ouvrière a fait l’objet de nombreuses exactions, lesquelles vont du massacre policier du 17 octobre à celui du métro Charonne, de l’attentat du Strasbourg-Paris à la longue succession d’assassinats racistes des années 1960, 1970 et 1980. Ces diverses manifestations de la violence de l’extrême-droite décomplexée – selon un terme qui revient au goût du jour – figurent ainsi la sauvagerie d’extrême-droite, en particulier à l’endroit des communautés maghrébines. Un nom en particulier incarne néanmoins dans la mémoire collective le traitement réservé par certains pans de la société française à sa minorité musulmane : la ratonnade. Le plus souvent, les ratonnades sont demeurées impunies ; plus encore, ceux qui en étaient les instigateurs et les maîtres d’œuvre bénéficiaient de complicités au sein de l’appareil d’État, ce qui institue ainsi la violence commise en mode de gouvernement à part entière à l’égard des communautés issues de l’immigration postcoloniale. Cantonnée lors des années 1990 aux fascistes et néonazis du Groupe Union Défense (GUD) et assimilés, la ratonnade semblait avoir bon an mal an perdu sa centralité dans le champ politique français et au sein de l’horizon collectif des communautés musulmanes. Il semble pourtant que la ratonnade ait retrouvé ses quartiers de noblesse. À l’occasion du match France-Maroc, pendant la coupe du monde de football de décembre 2022, déjà, une série de descentes coordonnées de l’extrême-droite avait visé les quartiers d’immigration de plusieurs villes françaises. Depuis lors, les ratonnades se multiplient. Il y a quelques semaines, une conférence en soutien à la Palestine à Lyon – tête de pont de l’extrême-droite française – a été visée par les nervis fanatisés de la barbarie fasciste. Il y a quelques jours, un jardinier d’origine maghrébine a été victime d’une tentative d’égorgement raciste dans le Val-de-Marne. Enfin, une coterie de jeunes suprémacistes blancs a voulu exciter les failles collectives de la société française en conduisant une émeute à Romans-sur-Isère, comme geste de représailles au meurtre tragique du jeune Thomas. Lundi soir, une centaine de militants d’extrême-droite ont défilé dans le Vieux Lyon, criant le slogan devenu tristement familier “Islam hors d’Europe”. Comme lors des précédents historiques,, la violence de ses expéditions racistes et de ces ratonnades est redoublée par l’impunité de leurs auteurs. Au mieux, ceux-ci ne sont condamnés qu’à des peines légères. Au pire, la qualification raciste du crime est déniée, comme s’agissant du jardinier du Val-de-Marne. Comment s’étonner d’un tel déni de justice par un État qui a fait du terme islamophobie un chef d’accusation à l’égard de ceux et celles qui sont victimes de la violence raciste ? La fascisation d’esprit admet des conditions de possibilité sociologiques et historiques, lesquelles requiert malheureusement plus que du volontarisme bien intentionné pour être mis en échec. La catastrophe en cours a pour fond la désaffiliation généralisée, l’anomie sociale et la désorganisation des structures collectives. Les ratonnades sont ainsi le plus souvent conduites par de très jeunes individus radicalisés, ce qui finit de convaincre que le problème que manifeste la violence raciste est aussi dangereux que profond. Pour autant, alarmé par la pente historique que suivent la société française et ses institutions, le Collectif contre l’islamophobie en Europe (CCIE) en appelle au sursaut des forces réellement progressistes, celles qui n’ont pas encore cédé à l’air du temps. Le pire doit être mis en échec ; il en va non seulement du bien-être des minorités voire de leur existence même, mais également du destin des sociétés européennes dans leur ensemble.

Pays-Bas – Geert Wilders, victoire d’un pionnier de l’islamophobie éradicatrice

C’est avec grande inquiétude que le Collectif contre l’islamophobie en Europe a pris connaissance de la victoire du Parti pour la liberté, emmené par son chef Geert Wilders, aux élections législatives néerlandaises tenues le 22 novembre 2023. Cette victoire, quoique inattendue par les sondeurs, était prévisible. Partout en Europe, l’extrême-droite la plus raciste et la plus virulente a le vent en poupe. En Italie, le parti héritier du fascisme mussolinien dirige le gouvernement depuis plus d’un an ; au Royaume-Uni, les conservateurs britanniques au pouvoir rivalisent d’outrance raciste, sur fond de désagrégation programmée de l’État social ; en Suède, plusieurs décennies après le reniement du modèle social-démocrate scandinave, la droite extrême est en charge des destinées du pays, secondée par un parti d’inspiration explicitement néonazie. En Slovaquie ou en Hongrie, le populisme d’extrême-droite a pris le pouvoir, tandis que l’Allemagne et la France font face à la perspective de plus en plus probable de l’accession au gouvernement de forces suprémacistes. Pourtant, dans ce paysage européen apparaissant uniformément conquis par la fièvre d’extrême-droite, le triomphe de Geert Wilders doit être singularisé. Abordé depuis la France, il doit être considéré comme un Zemmour ayant abandonné toute mesure d’auto-censure. Il avait ainsi déclaré en 2007 que le Coran “est le Mein Kampf d’une religion qui aspire à éliminer les autres”, avait refusé le terme de religion pour l’islam pour préférer l’expression  d’”idéologie d’une culture attardée”, et avait qualifié le voile de “serpillère”. Ami de l’écrivaine éradicatrice Oriana Fallaci, défenseur de l’interdiction du Coran et des mosquées aux Pays-Bas, référence obligée de l’ensemble des tendances que comptent le racisme contemporain et l’islamophobie, Wilders fait figure de précurseur. Dès le début des années 2000, il a ainsi fondé la matrice idéologique du renouveau de l’extrême-droite européenne, constituée d’un côté par la critique de l’État-providence et de l’autre par une islamophobie extrême. Près de vingt-cinq ans après ses premiers succès électoraux, la recette suprémaciste fait désormais pleinement florès. Les sociétés européennes, qui ont fait du libéralisme le cœur de leur pratique politique, ont-elles définitivement succombé à l’appel du suprémacisme débridé ? Le pire n’est jamais certain, mais il ne fait aucun doute que la période historique dont nous sommes témoins laisse entrevoir un avenir sombre pour les minorités musulmanes européennes. Le Collectif contre l’islamophobie en Europe (CCIE) adresse ainsi son appel à toutes les personnes qui refusent de voir le climat politique européen se détériorer : la solidarité et l’auto-organisation n’ont rarement été aussi nécessaires qu’à l’heure suprémaciste. Le CCIE encourage vivement toutes les organisations de défense des droits humains et chaque individu à s’unir dans une lutte collective, visant à garantir que les minorités musulmanes jouissent en Europe des mêmes droits que l’ensemble de la société, tant aujourd’hui que dans les années à venir.

Propos haineux à l’encontre des musulmans : une réalité ignorée

Nous constatons de plus en plus une haine en ligne visant la communauté musulmane et des paroles répandues dans les médias qui ne font que nourrir les discriminations. 🔴 Nous avons décidé d’agir ! Rejoignez-nous dans notre combat. 👉 Signez notre pétition pour lutter contre l’islamophobie dans les médias et faites entendre votre voix. 👉 Aidez-nous à recenser et signaler les propos haineux envers les musulmans via notre formulaire de recensement des propos islamophobes.

Cantine et consommation de viande

Télécharger la fiche pratique Lors de la rentrée scolaire, nous recevons beaucoup de signalements concernant la contrainte qui serait exercée sur les enfants afin de les forcer à consommer la viande, parfois de la viande de porc qui leur est servie à la cantine scolaire. Les arguments présentés pour justifier cette contrainte sont : – L’équilibre nutritionnel ; – Le goût ; – La laïcité. Les parents qui nous saisissent ne réclament alors ni repas confessionnel, ni repas de substitution, mais seulement que leurs enfants ne fassent pas l’objet de contrainte pour consommer de la viande. Peut-on contraindre mon enfant à consommer de la viande à la cantine ? Que dit la loi ? La cantine scolaire, qui est un service public facultatif, est un droit pour tous : « L’inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille » (article L131-13 du Code de l’éducation). Ainsi, dans le cadre de la restauration scolaire, il ne peut être établi aucune discrimination selon la situation de l’enfant ou celle de sa famille. Par ailleurs, l’autorité parentale est un ensemble de droits et devoirs permettant aux parents de prendre des décisions concernant l’éducation morale et religieuse de leurs enfants (article 371-1 du Code civil). À ce titre, leurs choix doivent être respectés. Aussi de nombreux textes juridiques protègent les convictions personnelles des parents. L’article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques affirme en son point 4. : « Les États parties au présent Pacte s’engagent à respecter la liberté des parents et, le cas échéant, des tuteurs légaux de faire assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs propres convictions ». Le droit interdit donc d’obliger un enfant à consommer un aliment qui ne respecte pas les croyances philosophiques ou religieuses de ses parents. Il est donc strictement prohibé de : D’obliger un enfant à manger des protéines carnées si les parents ont indiqué qu’ils ne le souhaitaient pas ou si l’enfant exprime expressément son refus ;  D’obliger un enfant à « goûter » un plat contenant des protéines carnées, même dans un objectif « éducatif ».  Le Défenseur des droits a considéré que « si la collectivité n’est pas tenue d’accéder aux demandes de menus de substitution, elle ne peut en revanche en aucun cas, sauf à porter une atteinte grave à la liberté de religion, contraindre un enfant à manger un plat contenant un aliment contraire aux prescriptions alimentaires que lui imposent ses convictions religieuses » (Rapport du 18 juin 2019 « Un droit à la cantine scolaire pour tous les enfants »).  Le service de restauration scolaire étant un service public facultatif, il n’y a pas de règle contraignante incombant aux maires en termes de distribution de repas, même s’il est recommandé d’offrir « une diversité de choix » (Observatoire de la laïcité). La commune doit être en mesure de mettre en place un encadrement spécifique pour prendre en compte le choix des parents lors du repas de l’enfant (Tribunal Administratif de Melun, 22 février 2017).  Selon l’article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant (CIDE) : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale », (Tribunal administratif de Dijon, 28 août 2017 n° 1502100, 1502726).  Par conséquent, les pratiques religieuses des adultes et des enfants, ainsi que le droit des parents de guider leurs enfants en matière religieuse, ne peuvent être interdits ou entravés que par des mesures de niveau comparable, et seulement si les interdictions ou les entraves constituent des mesures nécessaires à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Télécharger la fiche pratique

Le Collectif Contre l’Islamophobie en Europe est une association sans but lucratif basée en Belgique.

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